Le Tai Chi Chuan a joui depuis les années 80 en Occident d’une mode liée à l’état déplorable du rapport au corps de nombres d’Occidentaux meurtris de stress, de fatigue et d’alimentation de mauvaise qualité. Il a la grande particularité d’être un art martial qui attire à lui beaucoup de pratiquants dont les motivations sont pourtant complétement extérieures à cet aspect martial… Pourquoi ? Et bien tout simplement parce que le Tai Chi est une voie à la fois simple et profonde de reconquête de la Corporéité, d’un rapport au Corps rectifié, adouci et libérateur.
L’Occident s’est embourbé dans une vision négative du corps, lié au « péché », aux besoins animaux, à la sexualité vue sous l’unique angle d’une déferlante animale pulsionnelle. À l’inverse, l’esprit - et avec lui l’intellect - , a été vu comme la partie de l’humain noble, élevée et honorable : la seule voie de salut… Cette vision binaire schizophrénique et caricaturale imprègne encore à l’heure qu’il est bien des esprits et des constructions intellectuelles qui finissent par faire dépérir la perception même de ce qui anime le corps, de ce qui le rend vivant. Nous n’avons pas ( heureusement ! ) à penser à chaque instant à notre cœur pour lui dire de battre, ni aux cellules du rein pour leur rappeler de filtrer le sang, ni aux globules rouges de capter l’oxygène. Le corps porte en lui quelque chose qui nous dépasse et qui l’anime. Une intelligence, un ordre, une cohérence, une force de vie appelée dans beaucoup de traditions le Souffle…
Nous sommes ainsi embourbés et meurtris d’une vision du corps comme une sorte de mécanique bien huilée qui dysfonctionne parfois dans la pathologie dont l’ab-surdité apparente nous révèle en profondeur une surdité étonnante : celle de ce que Françoise Dolto appelait le « ce-par-quoi-j’ai-l’être »…
Appelez-le Dieu, Tao, énergie universelle, Souffle, ou autre. Peu importe le terme qui vous convient : ces mots désignent en fait une intime évidence, une phénoménologie enfantine sans laquelle l’être humain est un mutilé psychique et spirituel, un zombie, une coquille vide.
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